En ces moments de grand mécontentement dans notre pays qu'est la France, le système capitaliste est beaucoup remis en question, notamment par les socialistes et l'extrême gauche. Dalida, elle, a souvent tourné ce système en dérision dans certaines de ses chansons, plus ou moins engagées, mettant ainsi son ironie en relief, tout en restant le plus naturel possible...
Notons que le rapport de Dalida face aux Etats-Unis, nation du capitalisme, évolue peu à peu dès le début des années 1970. On a déjà vu ce que représentait dans l'imaginaire de la jeune Yolanda l'Amérique: les films américains de sa jeunesse dans un cinéma du Caire, son premier rôle dans Un verre, une cigarette
Dalida préfère la chanson française à texte, et la "canzonetta" italienne (pourtant passée de mode depuis belle lurette). Cette évolution, artistique, identitaire, va beaucoup plus loin : la pensée de Dalida se structure aussi au niveau de la politique, de la philosophie...
Elle rencontre au début des années 70 le Premier secrétaire du Parti socialiste, François Mitterrand et déclare dans une interview : " Je ne suis pas communiste mais je suis socialiste. "
En critiquant l'Amérique (" Une riche Américaine... ", Gigi l'amoroso, 1974), Dalida est, à travers quelques chansons, dans une dénonciation réelle du capitalisme effréné, ou du moins de la société de consommation et de la " bonne " pensée bourgeoise : (Sigarah wa kas, 1954) pour un cinéma égyptien en concurrence directe avec le cinéma hollywoodien... Dans les quatre années d'hiver qui suivent son retour à la vie, la Dalida " désarticulée " se reconstruit, cette reconstruction passant évidemment par une quête identitaire. C'est, avec sa passion pour la psychanalyse, la bataille entre l'inconscient et le conscient dalidéens. Dalida chasse le superficiel, elle veut du vrai. Pas question de faire l'Américaine pour faire l'Américaine.
JESUS KITSCH (1972)
" Jésus Kitsch, Jésus Kitsch, oh Jésus !
Tout est consommé
Jésus barbe et cheveux longs
Jésus lumière au néon
Il est né le dernier enfant de la consommation
Juda t'avait vendu pour trente pièces d'or
Te voilà revendu dans tous bons drugstores
Ta pub est au grand jour sur les murs de nos villes
Tu auras le Goncourt pour tes quatre évangiles "
NON CE N'EST PAS POUR MOI (1973)
" Les five clock, les soirées chocs
La musique pop et les sex shop
Non, ce n'est pas pour moi !
Les happenings et les meetings
Où l'on finit dans un sleeping
Non, ce n'est pas pour moi ! "
GIGI L'AMOROSO (1974)
" Tu pleures Gigi ?
Ça n'a pas été là-bas, hein ?
Et alors, et alors, qu'est-ce qu'ils comprennent
Ces Américains à part le rock et le twist, hein ?
Ma Gigi, qu'est-ce que tu croyais, devenir comme ça Gigi l'Americano !
E invece no, tu sei Giuseppe Frabrizio Luca Santini
Et tu es Napolitain ! "
Dalida triomphe sur la scène du Carnegie Hall de New York le 29 Février 1978, et refuse de nouveau un contrat qualifié "du siècle" avec les Etats-Unis, qu'elle avait déjà refusé en 1959. Un geste qui démontre bien un certain rejet des idées politiques américaines : " le profit avant tout ". Elle ne voulait pas qu'on lui dicte son apparence, elle ne souhaitait pas devenir une de ces pseudo-stars américaines, comme on en voit aujourd'hui...
En Mai 1981, le jour de l'élection du nouveau président François Mitterrand, Dalida marche vers le Panthéon : elle est la plus socialiste des stars américaines ! Elle prouve qu'elle reste fidèle à ses valeurs et à ses idées.
Quand Dalida chante "Money, Money" en 1980, ne tourne-t-elle pas le capitalime en dérision ?
" People will lie they will cheat
People dont care who they rob or beat
A woman will sell her precious body
That small piece of paper
Sure carries a lot of weight
For that mean, oh mean, mean greed
Yeaaaah ! "
Traduction :
"Il faut toujours que les gens mentent, que les gens trichent
Les gens se fichent de qui ils volent, qui ils battent
Les femmes vendent leurs corps précieux
Et ce petit morceau de papier (i.e. le billet)
A sans doute beaucoup d'importance
Puisque c'est, oui c'est de l'avidité."
C'est la même critique dans la chanson "Problemorama" de 1979 : "L'argent, l'argent, ça rend souvent méchant, ça les rend fous les gens, les gens..."